Comment j’ai dû apprendre à déléguer…

Enceinte je me faisais des tas de films, je me projetais avec ce petit cœur qui grandissait dans mon ventre dans tous les aspects du quotidien: Petit cœur et moi câlinant le matin dans le lit, petit cœur réclamant le sein, petit cœur et moi riant durant une session chatouilles… bref toute une série de chouettes moments qu’il me tardait tellement de vivre!

Mais la vie n’est pas un conte de fées. Je savais aussi que petit cœur serait malade par exemple, ou bien qu’un jour il quitterait la maison pour prendre un appart. Qu’elles soient belles ou un peu moins, ces scènes de vie tout droit sorties de mon esprit avaient pourtant un point commun: on les vivait ENSEMBLE…

En fait si on m’avait demandé de me projeter dans un quotidien « métro boulot dodo » avec mon bébé j’aurais été tout simplement incapable de le faire. Parce que je n’imaginais pas passer une seule heure sans Elle. Et pourtant j’étais bien consciente que mes idéaux étaient impossibles à réaliser, à moins de vivre en autarcie et de lui faire l’école à la maison ( quoi que pour ce dernier point j’en serais bien capable ). Avant d’y être inévitablement confrontée, je n’ai donc jamais pu me résigner à me voir vivre loin de mon bébé.

Le psychisme humain est hyper bien fait je trouve: le mien a fait de cette préoccupation un sujet complètement tabou, et donc jusqu’à la date d’entrée en crèche d’Aïnoha, je n’ai absolument pas voulu y croire. Croire que ça y est, il allait falloir vivre un peu sans Elle. Qu’il allait falloir… déléguer.

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Déléguer… je déteste ce mot. Car j’aime tout maîtriser. Dans tous les domaines de ma vie, je me plaît à gérer, à assumer, à me débrouiller ( sauf en cuisine tiens… ). Si il y a bien une phrase que je déteste entendre c’est « laisse je le fais » ( sauf pour la vaisselle tiens.. ). Plus sérieusement je n’aime pas vraiment l’improvisation, ni les imprévus. Alors je planifie, j’organise. Triste vous trouvez? Oh non j’aime faire des surprises au contraire! J’essaie juste de faire en sorte que tout « roule », et grâce à une organisation bien maîtrisée je me plais à me trouver des moments libres, des instants précieux qui me permettent de profiter de la vie.

Depuis que je suis Maman j’ai toujours mis un point d’honneur à presque tout savoir gérer seule. Papa rentre tard? No problem je maîtrise! J’aime tout gérer, de ses repas à ses lessives, car élever ma fille est une passion en fait. Les corvées qui ont un rapport avec Elle ne me font jamais râler, même lorsqu’il s’agit de nettoyer sa poubelle à couches. Si si. La fatigue ressentie à la fin de nos journées se transforme toujours en satisfaction: celle de jouer mon rôle pleinement. Mais afin de nous offrir un quotidien sécurisant, j’ai « imposé » en douceur un rythme à bébé: en me calant sur son rythme naturel de départ, je lui propose siestes et repas aux mêmes heures. Succès immédiat! Aïnoha est désormais réglée comme une horloge, ça lui permet de situer chaque moment de la journée, et ça me permet de pouvoir planifier nos sorties. Bien entendu on fait de petites exceptions quand c’est nécessaire, mais globalement même en vacances ces petits rituels sont conservés. ça fait partie de mon rôle à mes yeux: lui offrir un quotidien le plus doux possible…

Mon rôle… parlons-en. Sans doute inconsciemment, j’ai le sentiment de chercher à être indispensable dans la vie d’Aïnoha. Bien entendu une Maman l’est toujours! Mais j’ai besoin de me le prouver, c’est comme ça. J’appréhende tellement le jour où elle me dira que « c’est tellement mieux » chez sa copine, ou qu’elle préfèrera aller en centre aéré plutôt que de passer la journée à la maison avec moi… Ces moments ne viendront peut-être jamais, après tout moi-même j’ai toujours préféré rester avec ma Maman, mais aurais-je autant de chance que ma propre mère? J’ai instauré une relation basée sur l’écoute, la complicité et l’amour entre Aïnoha et moi, et ce sera je l’espère notre ciment pour la vie. Si il prend bien, il nous permettra de faire face à n’importe quelle tempête…

Et une première tempête intérieure tourbillonne en moi: il m’a fallu me résigner à laisser ma toute petite fille, mon bébé… à la crèche. Les enfants… quelles merveilles… ils s’adaptent si vite! En quelques jours elle est passée des larmes aux sourires. Pas encore aux rires, mais je sais que ça viendra. Mais moi… moi je n’ai pas les mêmes qualités. Les larmes me montent encore aux yeux lorsque, depuis mon bureau, je pense à Elle, seule là bas comme une grande ( alors qu’elle est encore si petite à mes yeux…), et que j’essaie de deviner ce qu’elle fait. Est-ce qu’elle joue? Est-ce qu’elle mange? Quand je l’imagine s’endormir seule là bas mon cœur se serre. J’espère tellement qu’elle ne se sent pas abandonnée

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Et puis même si j’arrive ( tant bien que mal ) à me faire à l’idée, pourquoi je sens encore que quelque chose ne va pas? Parce que je me sens privée de mon rôle voilà tout. Mon cher rôle de Maman. Je ne suis donc plus indispensable à ma fille: d’autres la nourrissent, la câlinent, lui chantent des chansons. Nos chansons. Apprendre à déléguer ce n’est pas si simple en fait. C’est même le plus difficile pour moi. Parce que je n’en ai jamais eu envie voilà tout. Il faut apprendre à demander à d’autres ce qu’elle a mangé, comment elle a dormi… il faut accepter de ne pas être là à chaque instant, et donc de potentiellement rater certains instants… L’idée qu’un jour, j’apprenne qu’Aïnoha a fait ses premiers pas loin de moi me rend malade. Et moi, qu’avait-je de si important à faire pour ne pas être là? Rien… car rien pour moi n’est plus important à mes yeux que ces moments précieux. Pourtant ce sont d’autres personnes qui les vivent aussi un peu avec Elle maintenant.

Accepter de déléguer c’est accepter de ne plus avoir la maîtrise totale, c’est accepter de ne pas toujours décider. Pour apprendre à déléguer il faut le vouloir. Il faut faire confiance. Sinon on subit. J’ai subi. Mais la vie me pousse à faire des efforts, et j’apprends petit à petit à faire confiance. Pas à pas, j’accepte de couper un tout petit peu le cordon. A peine. Après tout ça ne peut lui faire que du bien. J’ai en horreur les mères étouffantes qui décident de tout pour leurs enfants. Alors on prend sur soi, on apprend, on progresse.

Il faut aussi accepter de défaire ce qui a été fait avec tant d’amour: mon angoisse c’est que trop de changements lui soient imposés. Notre fonctionnement était au top, et sans doute à tord je me dis qu’ils ne feront… pas mieux que moi. Une idée très bête sans doute, car ce sont des professionnelles tout de même. Mais je suis celle qui la connais par cœur, celle qui lui a donné… la vie! Personne d’autre que moi n’est plus qualifiée pour ce job. Du moins à mes yeux.

Et puis mes inquiétudes ont été confirmées quand j’ai appris un jour durant l’adaptation qu’ils lui avaient fait sauter une sieste, ou un autre jour qu’ils l’avaient faite manger beaucoup trop tôt ( « Oh elle n’a pas un gros appétit! » … Forcément quand on doit manger 2h30 avant l’heure habituelle c’est pas un scoop… ). Sous prétexte que son rythme est en décalé des autres parce qu’elle se lève tard depuis sa naissance, ils lui ont tout chamboulé. Et le soir, pour la première fois en un an, je me suis retrouvée avec une petite Aïnoha en larmes. Comme c’est dur de déléguer. Mais j’ai réagi. Pour Elle. L’incident est clos, ils arrêtent de faire des expériences et suivront son rythme. Mademoiselle la princesse déjeunera à 14h30, seule, mais avec appétit. Jusqu’à ce que son rythme colle petit à petit à celui des autres.

Je ne voulais pas déléguer. Mais je le fais. A moi d’avoir l’intelligence de faire en sorte que ça n’impacte pas sur la joie de vivre d’Aïnoha. Elle arrive et repart en souriant de la crèche. Elle me montre l’exemple. Ma petite fierté…

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Je suis à peu près certaine que mon sentiment ne changera pas: je n’apprécierais définitivement jamais de faire garder mon bébé. Mais parfois on a pas le choix. Alors il faut apprendre à s’y faire au mieux. Jour après jour, j’apprends donc à… déléguer. Ce n’est pas facile, c’est un gros travail à faire sur moi. Ma motivation première de toutes façons c’est Elle, et ce moment où, une fois la porte de crèche refermée, je reprends mon rôle. MON rôle de Maman.

 

Comment ça se passe pour vous? Vous arrivez facilement à déléguer?

 

5 commentaires sur “Comment j’ai dû apprendre à déléguer…

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  1. Alala comme je comprends si bien ce que tu ressens.
    Ma petite n’est pas à la crèche, mais chez mes parents. Elle a cette chance, mais tous les matins je sens bien que même si j’ai entièrement confiance et que je sais qu’elle s’amuse comme folle, mon cœur se serre. Je ne m’y suis jamais faite.
    J’ai hâte d’être en congé de maternité pour passer du temps avec mes deux filles et j’ai décidé de prendre en septembre de l’année prochaine, mon congé parental à 4/5 ou mi temps (je dois encore décider …et prévenir mon patron ! hahaha)
    Courage, et dis toi que ta fille sait que tu l’aimes à la folie, même si tu n’es pas avec elle tout le temps.
    Estefania
    Honeymum.

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  2. Comme ton article me parle. Encore plus aujourd’hui où Pantouflette n’a voulu dormir que sur moi… Et la question qui raisonnait en moi c’était : « comment va t on faire dans 2 mois ? »

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Répondre à Estefania Garcia Laforgia Annuler la réponse.

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